Ce lundi, la démission de Bello Bouba Maïgari, ministre d’État chargé du Tourisme et des Loisirs, a été actée. Il est une figure politique de premier plan et est aussi le leader de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP). Cette décision, annoncée dans un contexte de tensions préélectorales, intervient quelques jours après qu’il ‘ait officialisé sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2025.
Il est un vétéran de la politique camerounaise, et une personnalité influente, particulièrement dans les régions du nord du pays. Membre du gouvernement depuis de nombreuses années et allié fidèle du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti au pouvoir, son départ du ministère du Tourisme et des Loisirs marque une rupture significative.
Avec un pays qui va à contre courant de ce qu’attend la population, poussée par sa base militante, l’UNDP ne pouvait plus maintenir sa plateforme commune avec le RDPC. Il y a aussi ce contexte politique marqué par l’incertitude autour de la succession du président Paul Biya. Fatigué par ses 92 ans et au pouvoir depuis 1982, l’idée d’une autre candidature de 7 ans insécurise. Alors, plusieurs figures politiques, y compris au sein du RDPC et de ses alliés, commencent à se positionner pour 2025. La démission de Bello Bouba, couplée à celle d’autres figures comme Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre de l’Emploi, traduit une reconfiguration des alliances à l’approche de ce scrutin crucial.
Une ambition présidentielle affirmée
À 78 ans, Bello Bouba Maïgari n’est pas un novice en politique. Ancien Premier ministre sous Ahmadou Ahidjo dans les années 1980, il a su maintenir l’UNDP comme une force politique influente, notamment dans l’Adamaoua et le Nord, malgré son statut de parti satellite du RDPC. Sa candidature à la présidentielle, annoncée début juin 2025, vise à capitaliser sur son expérience et son ancrage régional pour proposer une alternative au système actuel.
En quittant son poste ministériel, Bello Bouba cherche probablement à se présenter comme un candidat indépendant, libéré des contraintes de loyauté envers le gouvernement Biya. Cette stratégie lui permet de se démarquer du RDPC tout en mobilisant son électorat traditionnel, particulièrement dans le nord, où il bénéficie d’une forte popularité. Sa démission peut également être interprétée comme un moyen de prendre ses distances avec un régime de plus en plus critiqué pour sa gestion des crises sécuritaires (conflit anglophone, Boko Haram) et économiques (inflation, chômage).
Réactions et impact politique
La démission de Bello Bouba a suscité des réactions contrastées. Dans les cercles proches du pouvoir, certains minimisent l’événement. Ils soulignant que le départ d’un ministre d’État, bien que symbolique, n’ébranlera pas la machine gouvernementale. Cependant, dans l’opinion publique et sur les réseaux sociaux, ce départ est perçu comme un signe de fragilité du régime.
Pour le RDPC, la perte de Bello Bouba est un coup dur. L’UNDP, bien qu’allié, dispose d’un poids électoral non négligeable dans certaines régions, et sa candidature pourrait diviser l’électorat traditionnellement favorable au parti au pouvoir. Par ailleurs, ce départ renforce l’opposition qui pourrait chercher à capitaliser sur cette instabilité pour rallier des électeurs déçus.
Perspectives pour 2025
La démission de Bello Bouba Maïgari marque un tournant dans la préparation de la présidentielle de 2025. En se lançant dans la course, il rejoint un énorme champ de candidats potentiels qui pourrait inclure Emmanuel Franck Biya, fils du président, ou Éric Essono Tsimi, un universitaire et outsider politique. Sa stratégie consistera probablement à mobiliser les régions du nord tout en séduisant les électeurs lassés par des décennies de gouvernance RDPC.
Cependant, Bello Bouba devra surmonter plusieurs défis : le poids logistique et financier du RDPC, les obstacles administratifs auxquels font face les candidats indépendants, et la nécessité de construire une coalition large pour rivaliser avec les ténors de l’opposition. Sa longue association avec le régime Biya pourrait également être un handicap face à un électorat jeune en quête de renouveau.