Au lendemain de sa nomination à la présidence du comité Économique-Finance-Commerce du Shadow cabinet au sein du SDF, l’économiste et ancien militant du parti politique Croire au Cameroun (CRAC) se prononce.
Je me suis levé ce matin avec la nouvelle de ma cooptation au Shadow cabinet pour m’occuper des questions économiques, financières et commerciales. Évidemment, je tiens à remercier le Chairman pour cette marque de confiance et surtout, pour la parole tenue. C’est une denrée rare dans la politique camerounaise.
Je suis parti du CRAC avec l’intention de ne pas créer le 319ème parti politique au Cameroun. C’en faisait trop et ce n’était pas la solution tant recherchée par les Camerounais. J’avais activement travaillé en coalition avec plusieurs partis entre 2018 et 2021, et il m’était possible d’intégrer un autre parti poursuivant les mêmes objectifs que le CRAC. J’ai toujours cru en la possibilité de coaliser plusieurs partis politiques pour gagner. Le candidat du SDF aux présidentielles de 2018 était celui qui avait accepté d’intégrer intégralement les propositions que je portais au CRAC et c’est tout naturellement que nous sommes restés en contact.
Le Shadow cabinet est une commission technique chargée de faire des propositions alternatives aux positions du gouvernement. Loin des querelles politiciennes, je vais donc poursuivre en toute liberté ce que je sais faire le mieux, à savoir confondre le gouvernement sur sa gestion de l’actualité économique, budgétaire, fiscale, monétaire et commerciale.
J’ai toujours soutenu que ma génération ne devait pas commettre la même erreur que celle de nos aînés, à savoir abandonner la gestion du pays entre les mains des « mauvais ».
Pendant très longtemps, les intellectuels étaient restés enfermés dans la société civile, fuyant les critiques, et pensant ainsi mieux servir le pays. Pendant plus de 60 ans, ils ont aboyé et la caravane de la compromission de l’avenir de nos enfants n’a fait que passer. Que leur manquait-il pour prendre le pouvoir ? Pourquoi les gens de bien (société civile) doivent-ils toujours penser que leur rôle est de quémander la décision qu’ils ont eux-mêmes la possibilité de prendre directement en tant que citoyens jouissant de tous leurs droits civils et politiques ? Beaucoup de personnes de ma génération pensent qu’au lieu d’avoir à quémander, ils peuvent se mouiller et conquérir les positions de pouvoir pour procéder directement à la prise des décisions adéquates. Ceux qui décident aujourd’hui ne sont pas plus citoyens que Nous. Comme le regrettait Bernard Njonga en créant le CRAC, s’il avait été simplement maire au cours de ses 30 ans de lutte citoyenne, alors il aurait au moins montré l’exemple dans sa commune comme le fait actuellement son ancien compagnon qui est maire de Ngoulemakong dans le Sud.
Finalement, ce n’est pas une affaire de parti politique ni de personnes mais, de programme. Je m’attelerai à proposer un modèle économique viable pour notre pays.
Toutefois, le SDF est un parti politique en pleine reconstruction. Après 32 ans de lutte sans gagner, il est normal que le parti traverse une zone de turbulence. A noter qu’il ne faut pas confondre turbulence et crash! Il arrive qu’un joueur de haut niveau se blesse et quitte le stade pour longtemps. Mais, lorsqu’il suit son traitement de façon rigoureuse, il revient toujours en force avec le jeu de haut niveau. On peut comprendre que nos concitoyens soient devenus impatients. Mais, il n’y a techniquement pas de solution durable qui ne passe pas par des réformes structurelles. Le plus important pour notre sportif, c’est d’accepter de subir l’opération chirurgicale obligatoire pour son traitement. C’est à ce sujet qu’il faut savoir reconnaître et féliciter le courage et la qualité d’homme d’État du Chairman, Ni John Fru Ndi. Le SDF a effectué la catharcis. Il a fait son évaluation profonde. Il sait exactement pourquoi il n’a pas pris le pouvoir au cours des 30 dernières années.
L’une de ces raisons est l’approche centrée sur la dénonciation. En fait, lorsqu’un Camerounais se lève le matin, il cherche des solutions durables à ses problèmes. Or, on l’a distrait depuis longtemps avant les affaires de personnes. Le SDF n’avait pas été crédibles avec un modèle alternatif capable de transcender les barrières identitaires. Cette erreur sera corrigée. Et j’ai participé aux côtés du Chairman à plusieurs réflexions sur le projet du SDF New look. C’est donc tout naturellement que je me retrouve dans ce cabinet.
On ne perdra donc plus notre temps à répondre aux affaires de personnes comme de Nintcheu contre Osih. Le plan de redressement du Cameroun que nous proposerons pourra être mis en œuvre même par ma grand-mère. C’est fini l’époque des hommes providentiels. C’est aussi cela qui a empêché au SDF de prendre le pouvoir. Il est venu le temps de placer les Camerounais au cœur de la politique.
J’entends l’argument de ceux qui n’ont pour seul projet à proposer aux Camerounais que l’instrumentalisation de la haine allant dans le sens du rapprochement des uns au régime. Nous n’allons pas jouer sur ce terrain. Ma mission est de montrer au Camerounais ordinaire comment il peut faire joindre les deux bouts dans ce pays de misère. Aussi, si j’arrive à confondre le gouvernement sur ses positions et à faire bouger les lignes, alors j’aurai réussi ma mission technique.
Puisse Dieu accompagner cette nouvelle page qui s’ouvre aujourd’hui pour moi et pour le parti afin que vive le Cameroun !
Louis Marie Kakdeu