L’homme d’affaires et plusieurs éléments de la Dgre ont été inculpés dans le cadre de l’affaire Martinez Zogo le 4 mars 2023. Récit d’une audience très attendue.
Derrière les portes du Tribunal militaire de Yaoundé, des vies se jouent. Il est 4 h du matin ce samedi 4 mars 2023, après une nuit blanche passées dans cette juridiction, le juge d’instruction décide enfin de s’occuper des suspects de l’affaire Martinez Zogo. C’est d’abord le lieutenant-colonel Justin Danwe et ses éléments qui passent à tour de rôle devant Prospère Oyono Ebessa, magistrat de 2e garde et juge civil au tribunal militaire.
Justin Danwe ouvre le bal
Après avoir lu le réquisitoire introductif d’instance fait par le commissaire du gouvernement sur la base du rapport d’enquêtes préliminaires de la commission mixte police-gendarmerie, le juge d’instruction décide finalement d’inculper et de placer en détention provisoire tous les éléments du commando qui a enlevé et torturé le journaliste Martinez Zogo. C’est à la prison principale de Kondengui que ces nouveaux inculpés séjourneront au cours d’une période initiale de six mois, pendant que le juge mènera son enquête.
Le lieutenant-colonel Justin Danwe, directeur des opérations de la Direction générale de a recherche extérieure (Dgre), et ses éléments, sept au total, sont inculpés pour filature, enlèvement et torture. Le commissaire divisionnaire Maxime Eko Eko, le directeur général de la Recherche Extérieure (Dgre) est ensuite reçu par le juge d’instruction. Après quelques minutes d’échange, le magistrat venu d’Akonolinga décide de l’inculper. Le chef des renseignements spéciaux est envoyé en prison pour complicité de torture, selon son avocat.
Autour de Bidjang et compagnie
Vient ensuite le tour des civils. Yannick Nkili, le garde du corps de Jean Pierre Amougou Belinga, ainsi qu’un autre jeune homme, accusé d’avoir mis sa puce dans un des téléphones recherchés par les enquêteurs, sont rapidement disculpés. L’enquête préliminaire n’a pas réuni suffisamment d’indices permettant d’engager les poursuites judiciaires contre eux.
L’atmosphère, qui était légèrement détendue au tribunal militaire ce jour, commence à se crisper au moment où Bruno Bidjang et le colonel Etoundi Nsoe s’apprêtent à passer devant le juge d’instruction. Les membres de leurs familles venus par dizaines, n’ont d’autres choix que d’attendre impuissants la décision du juge d’instruction. Plus de peur que de mal, Bruno Bidjang est inculpé, mais va comparaitre libre tandis que le juge déclare n’avoir pas trouvé assez d’indices concordants contre le Colonel Etoundi Nsoe. Il est disculpé et épargné de toutes poursuites. La qualification pénale des faits mis à la charge du DG des entreprises de presse du Groupe l’Anecdote n’est pas révélée.
Prière et haies pour Amougou Belinga
Le premier coq a déjà chanté une fois et les premières lueurs du jour commencent à poindre à l’horizon. A 5h30 , seul Jean Pierre Amougou Belinga doit encore passer devant le juge d’instruction. Dans la foule, les commentaires vont bon train et les alliés de l’homme d’affaires sont certains que le bon vent, qui a commencé à souffler il y a quelques minutes avec les mises en liberté de Bruno Bidjang et du colonel Etoundi Nsoe, va continuer à souffler en faveur du Zomloa des Zomlo’o. Chose curieuse, les gendarmes demandent aux membres de la famille qui jouxtaient le bureau du juge d’instruction de descendre au bas de l’escalier. Au moment où le milliardaire Ekang, vêtu d’une chemise blanche, franchit la porte du bureau du magistrat qui doit décider sur son sort, deux haies se forment au hall du Tribunal militaire, le personnel du groupe l’Anecdote, fortement représenté, ainsi que les membres de la famille retiennent leur souffle. Sur un coin de la salle, une dame le front contre le mur égraine son chapelet.
Pendant qu’on attend la décision, sur le parvis, les véhicules de la gendarmerie et de police se positionnent et font ronronner leur moteur. Tout autour, un lourd dispositif sécuritaire, jamais vu depuis le début de l’affaire se forme. Un premier car ayant à son bord les éléments de la Dgre avance lentement pour prendre le rang. Un autre car immatriculé le talonne.
Lorsque le cortège démarre, l’assistance qui attendait encore que le Zomloa sorte du bureau du juge d’instruction découvre que son sort a déjà été scellé et que ce dernier se trouve masqué dans le second véhicule qui talonnait celui des éléments de la Dgre. Le jeune magistrat venait ainsi de tuer dans l’œuf les velléités de triomphe qui auraient animé les affidés de Jean Pierre Amougou Belinga au cas où celui-ci était disculpé. Jean Pierre Amougou Belinga vient d’être inculpé pour «complicité de torture par aide» et envoyé en détention provisoire à la prison principale de Kondengui.
Avec Kalara