C’était le clou de la visite. Où tout fut en contrastes. Emmanuel Macron entrait en Maternelle lorsque Paul Biya devenait président de la République du Cameroun, il y a quarante ans. Il y eut donc, un contraste, plus, une opposition, naturelle, non seulement de styles, mais aussi de postures et à la fin, une espèce de dialogue de sourds (au sens propre et au sens figuré) qui fit que les deux présidents, échangèrent en définitive une poignée de main dont personne ne sut si elle était de pure forme ou sincère.

L’essentiel du débat politique au Cameroun est cristallisé depuis une bonne décennie, sur le  » quand et comment s’achèvera le régime Biya « . Amélie Tullet de RFI, toute en circonvolutions posa la cruciale question. Le vieux président Biya face à Macron se la fit répéter (on peut être dur d’oreille à cet âge, pourquoi pas?) avant de répondre sur un modèle mathématique, invitant la journaliste à ôter quatre ou trois de sept pour trouver le moment où on saura s’il reprendra un quatrième septennat ( après ses trois premiers quinquennats). La réponse à la question que tout le monde attendait a donc été reportée à une date ultérieure.

Pour le reste, ce fut une sorte de tirs au but entre l’équipe de France des journalistes et celle du Cameroun . Ou je pose une question à ton président, et tu poses une question au mien, comme dans un scénario bien huilé. Emmanuel Macron annonça (avancée notable sur cette épineuse question) la mise sur pied d’une commission mixte d’historiens camerounais et français, pour élucider enfin la question des « évènements » ayant précédé la marche à l’indépendance du Cameroun. Paul Biya évoqua la démarche simple de « routine diplomatique », qui présidait à la visite du ministre de la défense du Cameroun à Moscou, en pleine guerre en Ukraine…

Pour une conférence dite « de presse », on pouvait s’étonner de la présence dans cette salle de tout le gouvernement, assis en rangs d’oignons, dont le directeur du Cabinet Civil, Mvondo Ayolo, calé sur une seule fesse dans une chaise inconfortable, qui n’arrêtait pas de bouger et d’échanger ce qui devait être des confidences, avec le Sgpr, Ngoh Ngoh.

La « grande royale », première dame, trônait sur un fauteuil somptueux , drapée dans une longue robe rouge décorée de tissu Ndop. Au fond de la salle, tel un anonyme, Frank Biya, devait dodeliner de la tête pour avoir un petit accès à la cérémonie, dont on aurait pu dire qu’il était un simple petit resquilleur.

Il y eut un long et grand moment de gêne, et de silence, ponctué par des sourires ennuyés , lorsque Paul Biya avoua n’avoir pas entendu une question . La journaliste la répéta et Emmanuel Macron, gentiment, répéta encore en simplifiant, en résumant …

Le tout s’acheva dans une ambiance très  » Le vieux Nègre et la médaille « , où les Français se félicitèrent d’avoir vu leur président aussi brillant. Et où les fans du camerounais échangeaient de larges sourires suite à la prestation de leur (vieux) lion. Les sourires égrillards révélés par la caméra qui a longtemps traîné sur les visages des participants à cette assemblée en disaient long sur cette curieuse affaire. Biya face à Macron. Où tout fut dit dans les non- dits.

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