Le Cameroun approche de l’élection présidentielle d’octobre 2025 dans un climat de tension palpable. La décision d’une nouvelle candidature de Paul Biya, 92 ans et président depuis 1982, cristallise les frustrations. Cette nation est partagée entre l’espoir d’un renouveau et le poids d’une stagnation politique. Ce moment charnière révèle les aspirations d’une jeunesse en quête de changement et les défis d’un système ancré dans un passé immuable.
Depuis plus de quarante ans, le Cameroun vit sous l’ombre d’un même dirigeant. Paul Biya, souvent surnommé le « Sphinx d’Etoudi », incarne une stabilité qui, pour beaucoup, s’apparente à une paralysie. Les statistiques sont éloquentes : près de 70 % de la population de l’Extrême-Nord, pour être spécifique, vit sous le seuil de la pauvreté. Et le chômage des jeunes atteint des niveaux critiques.
« Un autre mandat de Biya ? C’est comme attendre que la pluie tombe dans le désert », affirme Amina, étudiante de 24 ans à Douala. Son sentiment d’exaspération est largement partagé.
Sur les réseaux sociaux, où des millions de Camerounais s’expriment, la colère s’amplifie. Des publications dénoncent un système où des promesses électorales creuses, parfois accompagnées de gestes symboliques comme des distributions de vivres, peinent à masquer une réalité de corruption et de répression. Cette jeunesse, dynamique et éduquée, rêve d’un avenir où ses talents trouveraient un écho, mais se heurte à un mur d’indifférence.
Paul Biya, l’incarnation d’un passé qui tient la population dans une toile d’araignée
L’annonce, le 13 juillet 2025, d’une huitième candidature de Paul Biya a ravivé les tensions. À 92 ans, le président, dont la santé alimente les spéculations, reste une figure clivante. « Il a fait son temps. Pourquoi s’accrocher ? », s’interroge Martin, chauffeur de taxi à Yaoundé, exprimant un ras-le-bol généralisé. Malgré cela, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) mobilise ses partisans, comme lors du récent meeting à Maroua où des milliers de jeunes ont été rassemblés pour soutenir le président.
Ces démonstrations de force, souvent orchestrées par des élites locales, contrastent avec le désenchantement populaire. Les appels à la candidature de Biya, lancés dès 2021 dans des régions comme le Centre, semblent déconnectés des réalités quotidiennes : routes délabrées, accès limité à l’eau potable, et scandales de détournement de fonds publics. Pour beaucoup, cette candidature sonne comme une provocation.
Et cette opposition fragmentée, peut-elle se sublimer pour Cameroun 2025 ?
Face au rouleau compresseur du RDPC, l’opposition tente de s’organiser, mais ses divisions freinent son élan. Maurice Kamto, leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), se présente à nouveau, porté par son combat contre les fraudes électorales de 2018. Pourtant, d’autres figures, comme d’anciens alliés du régime ayant rejoint l’opposition, sèment la confusion. « Tout le monde veut être président, mais personne ne pense à unir ses forces », déplore un analyste politique à Bamenda.
Force est de constater que l’appel au changement gagne en puissance. Mais la répression, marquée par des arrestations et des interdictions de manifestations, complique la mobilisation. Les témoignages de militants, relayés en ligne, parlent d’un climat de peur, mais aussi d’une détermination croissante à briser le statu quo.
Les émotions d’une nation en ébullition
L’approche de l’élection 2025 au Cameroun suscite un tourbillon d’émotions. La frustration domine face à une élite perçue comme éloignée des réalités, incarnée par des institutions comme le Conseil constitutionnel, accusé de partialité. La peur est également présente, alimentée par des rapports d’ONG dénonçant une répression accrue contre les opposants. Mais c’est l’espoir, porté par une jeunesse connectée et audacieuse, qui donne au Cameroun une lueur d’optimisme.
« Le peuple est fatigué, mais il n’est pas vaincu », écrit un activiste en exil sur les réseaux sociaux. Ce mélange de colère et d’aspiration au changement se retrouve dans les rues, les marchés, et les discussions en ligne, où les Camerounais appellent à une mobilisation sans précédent pour façonner leur avenir.
Quel avenir pour le Cameroun ?
L’élection de 2025 pourrait marquer un tournant. Si Paul Biya, dont la santé déclinante ne se cache plus, se présente, il a quasiment 100% de chance de remporter par tous les moyens. Et s’il venait à se retirer, la Constitution confierait le pouvoir au président du Sénat, un proche du régime. Ce qui ne garantirait pas un changement profond.
Mais la jeunesse camerounaise, galvanisée par les réseaux sociaux, refuse de baisser les bras. « Le Cameroun mérite mieux », affirme une professeure à l’université de Buea. « Ce n’est pas seulement une élection, c’est une bataille pour notre avenir. » Cette énergie, portée par des millions de voix, pourrait redessiner le destin du pays.