Il faut le dire sans ambages, sans fioritures, que l’aura ou les ailes due Samuel Eto’o national sont aujourd’hui rognées de toutes parts. Lui à l’image de l’Albatros de Charles Baudelaire dans son poème éponyme, venu des sphères très éthérées du football mondial, se trouve échoué au milieu des huées des gestionnaires du football national.
On voit bien qu’il est tombé de très haut, lui le prince des nuées, par la dimension dont son image naguère si étoilée et enviée, est aujourd’hui brocardée à outrance et sans vergogne sur la place publique.
A force de dénigrer au propre comme au figuré son action à la tête de la Fécafoot, il passe aux yeux de beaucoup au sein de l’opinion comme un grand veule qui enterre proprement le prestige du football national. Son élection à la présidence de l’instance faîtière du football, unanimement saluée par les différents acteurs de ce sport et au-delà, est aujourd’hui en train d’aller en vrille.
Et pour cause ? Ses alliés d’hier, ont trouvé le moyen de se liguer contre lui, de travailler en toute intelligence pour une chute bruyante, des plus scandaleuses et des plus spectaculaires. Il est dès lors happé dans un engrnage sans fin, dans une levée de bois verts qui accompagne toute initiative.
Entre procès à outrance contre son management devant les juridictions internationales en matière de sport et les contestations ouvertes et virulentes inhérentes à son leadership, on ne sait plus où donner la tête. On peut à tout au moins soulever quelques interrogations dans la perspective de débrouiller un tant soit peu ce retournement de situation. Samuel Eto’o Fils, par sa posture, son déploiement est-il hermétique aux sollicitations de ses collaborateurs qu’il regarderait de haut ? N’en fait-il qu’à sa tête, n’accordant de crédit comme on le lui reproche, qu’à ceux qui chantent ses louanges ? A l’observation, le président de la Fecafoot dans son modus operandi est encore au quotidien comme il l’était autrefois dans les stades de football. En attaquant de race, il est tous les jours encerclé par une flopée de défenseurs exercés, déterminés à lui clouer le nez dans le gazon pour qu’il ne marque pas le moindre but. En moins de deux ans aux affaires, le nombre de ses détracteurs monte de manière exponentielle au point où aujourd’hui d’aucuns demandent tout simplement sa démission. Sur le terrain, les différentes équipes nationales n’honorent pas les espoirs placées en elles. Dans cette disette des résultats, au milieu des cris d’orfraie qui se lèvent de toutes parts, n’est-il pas indiqué pour Samuel Eto’o de revoir son modus operandi ? De changer de fusil d’épaule ? De couper un peu son vin ? De toute évidence, tant qu’il continuera avec le slogan « Eto’o peut », il ne manquera pas des abonnés à la vision « Eto’o ne peut pas ». Le management est un art qui demande tact, persévérance, pondération et fermeté avec une vision ancrée sur le cap, sans complaisance aucune. La sanction, quand elle prise, l’est plus dans une dimension pédagogique avant toute autre considération. On est arrivé à la certitude qu’aujourd’hui, en dehors d’un appel à une sorte d’états généraux du football, il est difficile d’envisager quelque solution pour rétablir dans sa prestance le leadership de la star barcelonaise.
Une société anthropophage
S’il y a une autre faille qui nuit gravement à l’ancrage du leadership de Samuel Eto’o sur la Fecafoot à côté de l’affirmation grandiloquent de son « starship », c’est bien aussi cette manie morbide de la société camerounaise d’injurier ses gloires, de les profaner ou de les détrôner surtout lorsqu’elles s’aventurent dans le champ glissant et clivant de la politique.
Eto’o, parce qu’il a donné sa caution au pouvoir à l’élection présidentielle de 2018, a visiblement entamé son prestige aux yeux de beaucoup, pas naïvement comme on pourrait le croire seulement au sein de l’opposition, mais de manière étonnante et transversale, ses adversaires se recrutent davantage au sein du pouvoir.
Dirait-on de ce fait qu’il a réussi l’exploit de se mettre tout le monde à dos ? Mais comment et dans quel intérêt ? Il y a ceux qui parlent « d’un ego surdimensionné », « d’un orgueilleux impertinent », ou « d’un populiste invétéré » avec une once d’accusation d’entretenir des ambitions politiques.
Ainsi explique-t-on pour certains ses déboires, le plaçant à la manette de ses propres malheurs. Et si c’était au fond la matérialisation de l’allégorie de la boite de crabes africains qui se tuent à demeurer tous prisonniers dans le bocal alors qu’ailleurs, sous d’autres cieux, ces crustacés se tiennent par les pinces pour s’échapper de l’enfermement.
De ce fait, Samuel Eto’o serait victime de la jalousie de ses frères camerounais, de ses proches. Pour se donner une idée, il y a lieu de considérer qu’aujourd’hui, ses adversaires les plus redoutables sont précisément ceux avec qui il avait des atomes crochus hier. Et dans sa bataille fratricide, tout y passe pour le réduire à néant, mettant sur la place publique des audio pour mettre à nu si possible la déchéance de l’homme du sommet de la Fecafoot.
Face à ceci, certains observateurs estiment que tout juste un retour d’ascenseur, car il est servi des armes qu’il utilisait hier pour descendre ses adversaires. En attendant l’urgente convocation d’un conclave des différents acteurs du football aux fins de laver le linge sale en famille, il est presqu’un impératif dès à présent de multiplier des signes de décrispation, que les différents états-majors de combat sans merci, s’ouvrent un peu plus aux doléances des uns et des autres.
Car à observer de près lors des débats, l’essentiel des ruptures est lié à l’autisme des différentes factions qui dorment sur leurs convictions. Un rassemblement pour débattre sans complaisance et sans tabous des points de rupture, donnerait au Pichichi une nouvelle onction pour sortir des clichés malveillants de « l’Eglise de Tsinga ». Ce sera là le début d’un autre scénario : l’envers d’un revers de Samuel Eto’o.